Campagnes d’augmentation salariales AG/AI et CRV/PPEI 2025
La récente présentation des résultats de la campagne d’augmentation salariale lors du CSE des Fonctions Centrales a soulevé de nombreuses interrogations et préoccupations. Cette campagne, qui comprend les Augmentations Générales (AG), les Augmentations Individuelles (AI), les Compléments de Rémunération Variable (CRV) et les Primes de Progrès d’Équipe et Part d’Individualisation (PPEI), révèle des tendances inquiétantes qui méritent une analyse approfondie.
À l’heure où l’égalité salariale devrait être une réalité, les chiffres présentés par la Direction posent des questions légitimes sur le manque d’équité et la persistance des inégalités entre hommes et femmes.
Bien que 1788 personnes aient bénéficié d’une mesure individuelle cette année, avec environ 2% de plus de femmes que d’hommes, l’analyse détaillée des données montre que les montants moyens d’augmentation restent systématiquement plus favorables aux hommes. Cette situation, loin d’être nouvelle, se perpétue année après année, malgré les engagements répétés de l’entreprise en faveur de l’égalité professionnelle.
Un portrait des inégalités persistantes et des disparités qui s’obstinent à travers les années
Les données présentées sont éloquentes : bien qu’un pourcentage similaire d’hommes et de femmes ait bénéficié d’augmentations individuelles (47% d’hommes et 49% de femmes chez les cadres), l’augmentation moyenne s’élève à 3,87% pour les hommes contre 3,67% pour les femmes.
Cette différence peut sembler minime au premier abord, mais elle s’inscrit dans une tendance persistante qui, année après année, creuse inexorablement l’écart salarial entre les genres.
Plus préoccupant encore, nous observons que chez les non-cadres, seulement 25% des femmes ont reçu une augmentation individuelle contre 46% des hommes. La Direction justifie cette disparité par un meilleur positionnement initial des femmes par rapport aux benchmarks et par des promotions en classe 5 – une explication qui ne suffit pas à dissiper notre inquiétude face à ce déséquilibre flagrant.
De plus, nous constatons des écarts significatifs dans les montants moyens d’augmentation entre hommes et femmes dans plusieurs directions allant de -500€ à -200€. Ces différences se retrouvent également au niveau des primes, avec des écarts tout aussi préoccupants.
Le paradoxe de la performance et de la rémunération
Un autre aspect troublant émerge de l’analyse des données : alors que les femmes présentent généralement de meilleurs taux d’atteinte des objectifs que les hommes (comme en témoignent les taux de CRV), elles reçoivent pourtant des augmentations individuelles moindres en pourcentage et en montant. Cette situation est particulièrement frappante chez les cadres de classe 6, où les femmes ont une ancienneté plus élevée que les hommes mais continuent à percevoir des augmentations inférieures.
La Direction tente de justifier ces écarts en évoquant la présence plus importante d’hommes dans certains métiers « sous tension » comme la Data, l’Actuariat ou la Direction des Investissements. Cependant, cette explication ne peut justifier un constat qui s’observe à l’échelle de toute l’entreprise et perdure depuis trop longtemps.
De plus, si l’entreprise calcule les écarts homme-femme par fonction pour obtenir un écart global qui ne doit pas dépasser 1,5%, nous nous inquiétons de constater que cet écart est passé de 0,93% il y a deux ans à 0,99% l’année dernière, montrant une tendance à la hausse plutôt qu’à la baisse.
À la Cfdt, nous affirmons fermement que ces écarts, même qualifiés de « minimes » par la Direction, ne devraient plus exister après tant d’années de travail supposé sur l’égalité salariale.
Les zones d’ombre de la politique salariale et la baisse inquiétante du nombre de bénéficiaires d’augmentations
Au-delà des inégalités hommes-femmes, un autre phénomène inquiétant se dessine : la diminution constante du pourcentage de salariés bénéficiant d’augmentations individuelles, et ce malgré l’amélioration des résultats de l’entreprise. Chez les cadres, ce pourcentage est passé de 51,58% en 2023 à 50,98% en 2024, pour atteindre 48,52% cette année. La situation est encore plus alarmante chez les non-cadres, où nous sommes passés de 42,38% en 2023 à 33,18% en 2024, puis à 32% cette année.
La Direction affirme compenser cette baisse par une augmentation du montant moyen des AI, mais les chiffres contredisent cette affirmation. Pour les cadres, le montant moyen est passé de 2147€ à 2195€, soit une augmentation d’à peine 50€ (environ 2%). Quant aux non-cadres, la situation est encore plus défavorable puisque le montant moyen a baissé, passant de 1388€ l’année dernière à 1208€ cette année, soit une diminution de plus de 200€. Cette tendance est d’autant plus inacceptable dans un contexte où l’augmentation générale est absente pour l’ensemble des cadres cette année, aggravant encore la situation pour de nombreux collaborateurs. En effet, 49% des salariés des Fonctions Centrales n’ont pas eu de mesure individuelle, ceci représente environ 1715 personnes, et de façon plus précise, c’est 56,22% qui n’ont pas eu d’augmentation (1968 personnes) et 92,46% qui n’ont pas eu de prime (3237 personnes).
Des explications insuffisantes et des pratiques contestables
La Direction justifie sa politique en expliquant que les augmentations individuelles et le CRV sont deux mécanismes distincts : le CRV récompenserait la performance, tandis que l’AI prendrait en compte le positionnement du salarié par rapport aux benchmarks internes/externes et ses responsabilités. À la Cfdt, nous contestons fermement cette vision. Une augmentation individuelle doit récompenser le travail fourni pendant l’année écoulée et non servir uniquement d’outil d’ajustement par rapport au marché. Un collaborateur ayant fourni un travail exceptionnel devrait pouvoir bénéficier d’une AI, même s’il est déjà bien positionné par rapport au benchmark.
Par ailleurs, nous sommes préoccupés par certaines pratiques rapportées par nos adhérents et sympathisants. Dans certains services, des managers ont indiqué ne pas pouvoir distribuer tout leur budget car ils devaient en reverser une partie à d’autres services de la même Direction pour cause de rattrapages salariaux, de plafonds trop bas pour certains salariés ou encore de changements de classe. Bien que la Direction affirme que l’allocation des budgets se fait de façon « collégiale » et que toutes les enveloppes sont entièrement dépensées, nous renouvelons notre demandes que les changements de classe et les rattrapages n’impactent pas les enveloppes d’AI. Ces mesures devraient faire l’objet de budgets spécifiques afin de ne pas pénaliser les collaborateurs méritants. Si votre manager a utiliser ces excuses pour se justifier de ne pas vous augmenter, n’hésitez pas à en informer vos représentants du personnel Cfdt.
Nos revendications pour une politique salariale juste et transparente, vers une véritable égalité salariale entre hommes et femmes
Face aux constats alarmants révélés par les chiffres de la campagne d’augmentation, vos élus exigent une action immédiate et concrète pour mettre fin aux inégalités salariales entre hommes et femmes. Nous demandons la mise en place d’un véritable plan de rattrapage avec un budget dédié, distinct des enveloppes d’augmentation individuelle. La Direction affirme qu’il n’y a pas de femmes « notoirement en décalage » par rapport aux hommes sur « les mêmes métiers », mais les chiffres présentés contredisent cette affirmation.
Nous revendiquons également une transparence totale sur le calcul des écarts salariaux homme-femme et l’évolution de l’indicateur global. Si celui-ci continue d’augmenter pour se rapprocher du seuil de 1,5%, des mesures correctives doivent être prises immédiatement. Par ailleurs, nous souhaitons que la Direction s’engage à ce que les augmentations moyennes en pourcentage soient au moins équivalentes entre hommes et femmes dans toutes les classes et dans toutes les directions. Les explications sur les « métiers en tension » ne peuvent justifier des inégalités systémiques qui perdurent depuis des années.
Au-delà de l’égalité homme-femme, la Cfdt revendique une révision complète de la politique d’augmentation individuelle. Nous demandons l’arrêt de la tendance à la baisse du nombre de bénéficiaires d’AI et une augmentation significative des budgets dédiés, en cohérence avec les excellents résultats financiers de l’entreprise. Il est incompréhensible que la part des salariés bénéficiant d’une AI diminue année après année alors que les résultats du groupe sont en constante progression.
Nous exigeons également une plus grande transparence dans l’allocation et l’utilisation des budgets d’augmentation par direction. Les collaborateurs doivent pouvoir comprendre les critères qui ont présidé à l’attribution ou non d’une augmentation individuelle ou d’une prime. Nous demandons que les managers soient tenus de justifier leurs décisions auprès des salariés, afin d’éviter tout sentiment d’arbitraire ou d’injustice. Enfin, nous souhaitons la mise en place d’un véritable dialogue social sur la politique salariale, permettant aux représentants du personnel de participer à l’élaboration des règles de distribution des augmentations et non simplement d’en constater les résultats a posteriori.
En conclusion, la présentation des résultats de la campagne d’augmentation salariale 2024 révèle une réalité préoccupante qui appelle des actions concrètes et immédiates. Les inégalités persistantes entre hommes et femmes, la diminution constante du nombre de bénéficiaires d’augmentations individuelles et le manque de transparence dans l’allocation des budgets sont autant de signaux d’alerte que la Direction ne peut continuer à ignorer.
À la Cfdt, nous continuerons à porter la voix des salariés et à défendre leurs intérêts avec détermination. Nous appelons l’ensemble des salariés à se mobiliser pour exiger une politique salariale plus juste, plus équitable et plus transparente. Car au-delà des discours et des promesses, ce sont les actes qui comptent. Et les chiffres présentés, lors de ce CSE, nous montrent que le chemin vers l’égalité salariale et la reconnaissance équitable du travail de chacun est encore long.
Nous ne nous résignerons pas face aux injustices et continuerons à revendiquer avec force ce qui devrait être une évidence : une rémunération juste et équitable pour tous, sans discrimination de genre, d’âge ou de fonction.